Les serveurs de WikiLeaks en sûreté dans un bunker antinucléaire à Stockholm
Dans un quartier branché de Stockholm, une colline enneigée surmontée d'une église cache en son sein un bunker antinucléaire qui abrite un centre informatique futuriste où sont entreposés 8.000 serveurs, dont deux appartiennent à WikiLeaks.
- Publié le 10-12-2010 à 15h12
- Mis à jour le 10-12-2010 à 16h10
Dans un quartier branché de Stockholm, une colline enneigée surmontée d'une église cache en son sein un bunker antinucléaire qui abrite un centre informatique futuriste où sont entreposés 8.000 serveurs, dont deux appartiennent à WikiLeaks. "Tout ce ramdam planétaire est créé par ces deux petites boîtes", explique le patron fondateur de Banhof, Jon Karlung, en faisant visiter ces installations creusées dans la roche. A hauteur de genoux, rangés dans une armoire aux portes transparentes, deux fins caissons de plastique noir entourés de câbles électriques émettent un clignotement bleu, signe de bon fonctionnement. Anonymes dans cette armoire blanche fermée à clé, elle-même identique aux dizaines d'autres qui s'alignent en longues rangées.
Banhof est l'une des sociétés accueillant depuis octobre les serveurs de WikiLeaks, ce site controversé qui publie des documents secrets et notamment, depuis fin novembre, des câbles diplomatiques américains.
Dans le ronronnement des serveurs et des ventilateurs chargés de maintenir la température fraîche, M. Karlund poursuit la visite de ce centre spectaculaire mais qui, de son aveu même, n'a rien de particulier dans son fonctionnement. Le client WikiLeaks, malgré toute l'attention qu'il attire, est traité exactement comme les autres, assure-t-il.
Impossible cependant, en pénétrant dans ce sanctuaire, de ne pas se croire dans un décor de film de science-fiction ou d'espionnage dont le personnage principal serait l'énigmatique Julian Assange, l'homme qui défie à lui seul -ou presque- les grandes puissances internationales, via WikiLeaks. M. Assange est actuellement détenu à Londres en vertu d'un mandat d'arrêt international émis par la Suède qui le recherche dans le cadre d'une affaire de viol.
Pour pénétrer chez Banhof, il faut d'abord passer une porte coulissante en verre qui s'ouvre -grâce à un code- dans un rideau de vapeur créé par l'évacuation dans l'atmosphère glaciale extérieure de l'air chaud intérieur. Puis, alors qu'il descend une rampe vers le coeur même du dispositif encore protégé par un sas dont l'ouverture se commande également par un code, le visiteur est assailli par la chaleur et l'humidité étouffantes.
Après avoir servi de salle d'exposition, il a été repris il y a quelques années par Banhof qui y a implanté son cinquième centre de stockage de données informatiques. "Nous sommes très bien protégés contre des attaques physiques, mais ce n'est pas ce que nous risquons. La menace réelle peut être juridique et plus probablement encore des cyber-attaques", souligne M. Karlund.
Dans un bureau contigu à la salle des serveurs, le trafic WikiLeaks s'affiche en temps réel sur un écran. "Jusqu'à maintenant, nous n'avons subi aucune attaque directe. Nous avons observé des effets liés à d'autres attaques, mais aucune visant notre installation ou les services qui y sont attachés", explique-t-il en rappelant que WikiLeaks n'avait "pas mis tous ses oeufs dans le même panier" et possédait d'autres serveurs dans le monde. A condition de ne pas enfreindre la loi suédoise, les clients tels que WikiLeaks peuvent stocker leurs serveurs chez Banhof . "Ils doivent payer leurs factures et leur contenu doit être légal en Suède", explique M. Karlund pour qui sa société fournit un service comparable à la poste. Et lui demander ce que ses clients diffusent via les serveurs entreposés chez Banhof "revient à demander au facteur s'il ouvre le courrier".
Des dissidents de WikiLeaks dévoilent leur projet concurrent OpenLeaks Des dissidents de WikiLeaks fâchés avec son fondateur Julian Assange ont précisé vendredi leur projet concurrent, baptisé OpenLeaks, qui doit être lancé prochainement et qui visera à faciliter les fuites directement aux médias. Contrairement à WikiLeaks, le site OpenLeaks ne publiera pas directement sur Internet, mais permettra à des médias partenaires de recevoir des informations, expliquent l'ancien porte-parole allemand de WikiLeaks, Daniel Domscheit-Berg, et l'ex-membre islandais Herbert Snorrason. "OpenLeaks est un projet technologique qui a pour but d'être un fournisseur de services aux tiers qui veulent pouvoir recevoir des informations de sources anonymes", déclare M. Domscheit-Berg dans un documentaire sur WikiLeaks qui sera diffusé dimanche soir par la télévision suédoise SVT et que l'AFP a visionné. L'adresse du futur site, openleaks.org, est active et affiche "disponible prochainement" sous un logo. Créé en 2006, le site WikiLeaks spécialisé dans la publication de documents confidentiels vient de provoquer une tempête diplomatique en diffusant des milliers de télégrammes diplomatiques américains. Son fondateur Julian Assange est en détention depuis mardi à Londres en vertu d'un mandat d'arrêt international lancé par la Suède pour une affaire de viol.